vendredi 19 juin 2020

COMMUNICATION ET ROLE DE L’IMAGE

 A. LA COMMUNICATION


A Quoi sert le langage ?

 

LES ENIGMES DU LANGAGE

Le langage sert-il à communiquer ? La question peut paraître saugrenue : à quoi pourrait-il servir d’autre ? C’est pourtant une question que les spécialistes des langues et de la communication prennent au sérieux (1). Noam Chomsky, le linguiste le plus connu du XXè siècle, n’a-t-il pas affirmé « Il est faux de penser que l’usage du langage humain se caractérise par la volonté ou le fait d’apporter de l’information. » ?

Pour les uns, le langage est d’abord un support pour la pensée et non un instrument de communication. Son rôle serait en quelque sorte de permettre à la pensée de se constituer, de se mettre en forme. Selon cette hypothèse, le langage se conforme d’abord aux règles de la bonne communication. Langage et pensée seraient en quelque sorte consubstantiels. La communication ne serait qu’un dérivé de cet outil. Cette hypothèse suppose cependant que les animaux, les personnes qui n’ont pas accès au langage (bébés, sourds-muets, aphasiques) n’ont pas accès à la pensée... Cette question fait l’objet d’un grand débat (2).

Pour les autres, le langage est avant tout un instrument de communication et non un outil pour la pensée. Son rôle est d’abord d’informer, d’influencer, de permettre une communication complexe.

Mais dès lors, comment comprendre que cet instrument soit si imparfait, que les messages entre un locuteur et son récepteur soient si souvent ambigus, imprécis, déformés ?

Pour tenter d’éclaircir ces questions et de juger de la validité de ces hypothèses, il nous faut plonger dans les dédales d’un siècle de recherches sur le langage et la communication humaine.

Les recherches des linguistes s’organisent autour de quatre grandes questions concernant le langage. Quelle est sa nature ? Comment évolue-t-il ? Possède-t-il une logique interne ? Comment fonctionne la communication ?

 La question de la nature du langage humain suppose de mettre en évidence ce qui le distingue nettement de la communication animale.

Une deuxième grande préoccupation des linguistes réside dans le recueil, le classement et l’établissement de la généalogie des langues. C’est là un travail long et passionnant auquel se sont consacrés la plupart des spécialistes du XIXè siècle dont l’objectif a été de découvrir des lois élémentaires de composition du langage.

Une réorientation des études récentes concerne les usages concrets de la langue dans son contexte d’utilisation. D’où son intégration dans les études liées aux mystères de la communication humaine.

           

II  NATURE, ORIGINE ET HISTOIRE DES LANGUES

Les animaux communiquent entre eux par des chants, des cris, des gestes, des odeurs... mais ont-ils à proprement parler un langage ? Quelles différences entre communication animale et langage humain ? Pour répondre à ces questions, il est nécessaire de faire un détour par les formes de communication au sein du monde animal.

 

LA COMMUNICATION ANIMALE

Les études sur la communication animale ont débuté dans les années 30 avec les célèbres découvertes de l’éthologue autrichien Karl von Frisch (1886 - 1983) sur la danse des abeilles (1). Il réussit à démontrer que les abeilles éclaireuses, revenues à la ruche, indiquent à leurs congénères où se trouve de la nourriture en réalisant une « danse » particulière dont la forme (en rond ou en zigzag) et la rapidité indiquent la distance et l’axe d’orientation par rapport au soleil.

 

Ce système d’information, extraordinairement complexe, suppose une forme de symbolisme : l’information (distance et orientation par rapport à la ruche) est transmise au moyen d’un système codifié. Depuis lors, les spécialistes ont découvert que les animaux sont capables d’une communication très riche. Ils se sont alors attachés à décrypter aussi bien le discours du pinson que les modes de communication du zèbre, de la grenouille ou du chimpanzé.

 

LANGAGE HUMAIN ET LANGAGE ANIMAL

 

Le langage humain est un système bien plus élaboré que les formes de communication présentes dans le monde animal.

 

Dans le meilleur des cas, les animaux peuvent transmettre des messages simples, mais ils ne savent pas composer une poésie, raconter une histoire, argumenter, émettre un avis nuancé sur le temps qu’il fait... Pourquoi ? il y a au moins deux raisons à cela.

·      La double articulation du langage

La première raison est proprement linguistique : la nature du langage humain permet une infinité de variations inaccessibles aux codes de communication animale.

Le langage humain est fondé, selon le linguiste français André Martinet, sur une « double articulation » (1). Il est d’abord construit à partir d’unités de sens comme cours, maman, arbre, bateau... Ce sont des morphèmes (2).

Ces unités de sens sont elles-mêmes formées de segments phonétiques plus simples ( phonèmes) (le son pin est présent dans sapin, lapin, pinson, etc.). Cette architecture à deux étages permet une combinatoire très complexe et infiniment variée. C’est ce qui permet de construire une grande variété de mots, puis de formules sophistiquées.

·      La créativité humaine

L’autre distinction entre la communication animale et le langage humain est de nature intellectuelle. La maîtrise du langage élaboré exige des capacités de symbolisation complexes dont ne disposent pas la plupart des animaux (3).

Cela dit, cet orgueil proprement humain à vouloir se distinguer du reste du genre animal doit être tempéré.

Pendant longtemps, les scientifiques ont admis que le langage humain  n’était qu’un fait de culture, acquis par un long apprentissage. La communication animale serait, elle, innée et stéréotypée. Aujourd’hui, on sait que la frontière entre les deux formes de communication n’est pas aussi tranchée ni étanche.

LE MYSTERE DE BABEL, EVOLUTION ET VARIETE DES LANGUES

Quand le langage humain est-il apparu? Vraisemblablement entre 250 000 ans et 100 000 av. J. -C. Ce sont des évolutions anatomiques importantes comme la formation du tractus vocal (Larynx, pharynx et cordes vocales) qui l’ont rendu possible. Y a-t-il eu un seul foyer de création des langues ou plusieurs ? C’est là une grande énigme historique. Il faut bien admettre que l’on ne dispose pas de solides informations qui permettraient de trancher en faveur des deux thèses théoriquement possibles : celle de l’unicité de l’invention et celle de plusieurs inventions parallèles.

Il existe environ 3000 langues actuellement parlées dans le monde (de 3000 à 4500 selon les auteurs et leurs définitions de la langue). Malheureusement, beaucoup d’entre elles sont en voie de disparition , et certains spécialistes estiment qu’au milieu du XXIè siècle il n’en restera plus que 1000 ou 2000. Les langues disparaissent du fait de l’extinction des populations traditionnelles, de leur acculturation, de l’alphabétisation et de l’essor des langues dominantes. Parmi ces langues, beaucoup n’ont même pas été décrites et recueillies comme fonds documentaire de l’humanité. « Sur douze à quinze cents langues africaines, une centaine seulement sont décrites par des documents de base (une grammaire, un dictionnaire, un recueil de texte). Sur les deux cent cinquante langues tibéto-birmanes, seule une dizaine ont pu être ainsi étudiées. La diversité des langues s’atténue. » (1).

La langue la plus parlée est actuellement le chinois (du fait même de l’importance de la population chinoise) mais la plus répandue, celle qui est en passe de devenir la langue de communication internationale, est sans conteste l’anglais.

 

 

III LE LANGAGE ET SON FONCTIONNEMENT

On a vu que F. SAUSSURE  a sorti la linguistique des méandres de l’approche descriptive et historique des langues pour rechercher une « algèbre du langage », les règles de fonctionnement de la langue.

Il définit donc la langue comme un système de signes et le signe linguistique comme une entité à deux faces : la signifiant et le signifié.

 

III.1  SIGNE, SIGNIFIANT, SIGNIFIE : 

·      Le signe est le représentant d’autre chose qu’il évoque à titre de substitut. Les mots, les sons, les couleurs, les images qui nous environnent sans autant de signes dont le sens émerge d’un système d’interprétations. Notons que les signes ne se réduisent pas aux signes linguistiques mais englobent aussi les signes visuels ou sonores.

·      Les signes sont de nature dichotomique, ils sont formés de deux éléments : l’un sensible (signifiant) et l’autre non sensible (signifié). Saussure nous explique que « nous appelons signe la combinaison du concept et de l’image acoustique » et nous propose de remplacer ces deux termes, respectivement, par signifié et signifiant. Ces deux derniers liés solidairement dans le code.

REMARQUE

Le signe linguistique est un signifiant qui renvoie au concept, son signifié, mais ce concept est à son tour un signe, le signifiant abstrait dont le signifié (ou le référent) est fourni par les objets singuliers.

Ainsi décrit, le signe (linguistique, en particulier) est décrit comme pourvu de deux propriétés, les principes du signe.

 

n 1èr Principe : l’arbitraire du signe.

Le lien unissant le signifiant au signifié est arbitraire. Ainsi l’idée de sœur n’est liée par aucun rapport intérieur avec la suite de sons S-ö-r.

La preuve : les signifiants sont différents d’une langue à une autre pour un même signifié (sister).

 

Critique :

En réalité, les deux aspects de l’arbitraire du signe sont intimement liés. On peut désigner une sœur par un certain nombre de mots (être humain, femelle, amie, parente, compagne de jeu, etc.) mais pas par tous les mots : arbre, tableau, bœuf. Le signifié renvoie nécessairement à un référent, ce à quoi le signe réfère dans le discours (une classe d’objets singuliers).

En outre, le signifié du signe français sœur ne se confond pas totalement avec celui du signe anglais  sister : on peut dire en français, « Et ta sœur ! » ou « âme  sœur », ce qui est impossible, en anglais , avec le mot sister.

  -  Second principe : Le caractère linéaire du signifiant

  -  Le signifiant du signe linguistique, étant de nature auditive, il se déroule donc dans le temps et représente une étendue ; Cette étendue est mesurable dans une seule dimension : c’est une ligne.

Saussure parle de « caractère linéaire de la langue » pour la distinguer des systèmes de signes visuels qui peuvent offrir de combinaisons simultanées sur plusieurs dimensions (peinture, archi...).

 

IV. LES PRINCIPAUX COURANTS DE LA LINGUISTIQUE MODERNE :

1.   Les fonctions du langage selon Roman JOKOBSON

·      Les fonctions du langage selon Roman JAKOBSON

R. JAKOBSON (1896-1982), un des créateurs de la phonologie, était un véritable globe-trotter de la linguistique. Né à Moscou, il participa au Cercle linguistique créé dans sa ville natale, puis il fut un des créateurs du Cercle de Prague (fondé en 1928), puis de celui de Copenhague dans les années 30, avant d’émigrer aux Etats-Unis, à New York. Ses domaines d’intérêt étaient multiples : l’anthropologie, le folklore, la psychanalyse, la théorie de l’information. Cet éclectisme  intellectuel doublé d’une forte personnalité anticonformiste l’a conduit à proposer nombre d’hypothèses et de modèles très stimulants, mais pas toujours parfaitement rigoureux.

Dans son Essai de linguistique générale (1963), R.Jakobson a proposé de distinguer six fonctions du langage :

n La fonction « référentielle » consiste à délivrer une information ;

n La fonction « phatique », ou « de contact », vise simplement à établir ou à maintenir un contact, comme lorsque l’on dit « Allô ! » au téléphone ;

n La fonction « poétique » est à la recherche de l’esthétique, comme dans les effets de style, la poésie ;

n La fonction « conative », ou « appellative », vise à agir sur le destinataire, par exemple en donnant un ordre ;

n La fonction « métalinguistique » consiste à réguler son propre discours (« je veux dire que », « tu comprends ? », etc.).

 

2.   La Grammaire générative de N. CHOMSKY

Les linguistiques fonctionnalistes ont dominé la scène linguistique des années 20 aux années 50. Ils concevaient la langue, ainsi qu’on vient de le voir, comme une sorte de machinerie , avec ses pièces, ses fonctions, son armature... Dans les années suivantes, les recherches vont se déployer dans une perspective voisine. Il s’agit de découvrir une sorte de « programme universel », à l’image d’un logiciel d’ordinateur ou du programme génétique de la cellule, qui permettrait de produire la diversité des paroles à partir de quelques règles simples. Tel est le projet des « grammaires génératives » dont le linguiste américain Noam Chomsky sur la figure la plus marquante et qui  se présente comme la recherche d’un système formel du langage, d’une grammaire universelle d’où dériveraient toutes les langues et leurs énoncés possibles.

Né à Philadelphie en 1928 de parents émigrés russes, N. Chomsky a fait ses études de linguistique à Harvard, et c’est à quelques pas de là, au MIT (Massachusetts Institute of Technology), qu’il fera toute sa carrière de linguistique doublée d’un activisme intellectuel assez radical en faveur de positions anti-impérialistes ou antinucléaires. La grammaire générative de N. Chomsky se présente comme la recherche d’un système formel du langage, d’une grammaire universelle d’où dériveraient toutes les langues et leurs énoncés possibles.

 

3.   John Austin et la pragmatique

Si la langue est bien une construction ordonnée, si elle possède ses règles et ses structures, elle n’est pourtant pas totalement réductible à une belle architecture logique. Le projet des linguistes formalistes - celui de découvrir un ordre élémentaire du langage qui aurait permis de reconstruire toutes les langues et leurs énoncés à partir d’une armature logique simple - s’est pour l’instant soldé par un échec.

Mais cet échec (provisoire ?) n’est-il pas porteur de significations ? Si les linguistes ne peuvent pas décomposer les langues humaines en atomes et en molécules de sens comme le font les chimistes pour la matière, cela est peut-être dû au fait que la langue ne peut pas reposer uniquement sur une architecture abstraite.

Le fonctionnement de la langue peut-il être isolé de son contexte d’utilisation, de son inscription dans le monde social, de son insertion dans les interactions humaines ?

Toute l’orientation des recherches au cours des deux dernières décennies à consisté justement à réintégrer le langage dans le processus général de communication. Telle sont les directions prises par de nouveaux courants de recherche : la pragmatique, l’analyse de conversation ou la sociolinguistique.

 

LA PRAGMATIQUE : LE POUVOIR D’AGIR AVEC DES MOTS

   Le philosophe anglais John L. Austin (1911 - 1960) est la principale figure de la pragmatique. C’est une discipline qui envisage le langage en tant qu’outil pour agir sur le monde et non pas seulement comme un outil pour exprimer des pensés ou pour transmettre des informations. Agir sur le monde ? Austin parle d’ « actes de langage » pour désigner des énoncés en tant qu’ils permettent d’agir sur soi, sur les autres, sur les événements (1).

·      Austin et les actes de langage

Alors que l’énonciation « je suis en forme » n’a qu’une fonction d’expression et d’information, la phrase « Rends-moi mon stylo ! » a pour but de provoquer un comportement chez autrui. Parfois, la volonté d’agir sur autrui s’effectue sous une forme voilée, cachée derrière un simple constat. Ainsi la phrase « Il est tard, n’est-ce pas ? » qui, dans son sens premier, n’est qu’un constat neutre (Austin parle d’« énonciation constative »), contient en fait, dite dans un certain contexte, un autre message. Si la phrase est prononcée par une épouse à son mari au cours d’une soirée, elle signifie implicitement « je suis fatiguée, rentrons »,. L’énoncé prend donc un effet « performatif » (de l’anglais to perform qui signifie « faire, accomplir »).

 

4. Le courant sociolinguistique

Dominé par la figure de W. Labov, s’intéresse surtout à l’inscription culturelle et sociale du langage. Ses sujets de prédilection sont les variations syntactiques et lexicales selon les groupes sociaux (sociolectes), les règles sociales du dialogue et les situations de contact entre les langues.

Enfin, à partir des années 60, s’est développé aux Etats-Unis un courant dit de l’analyse  conversationnelle,  pratiqué au départ par les éthnométhodologues comme E. Goffman. Son postulat de base est que la communication verbale est un processus interactif : tout discours (plus ou moins inscrit dans un dialogue) est le résultat d’une construction à deux, Séquençage des dialogues, tour de parole, reprise, reformulation, accord ou désaccord des partenaires sont les éléments sur lesquels porte l’analyse conversationnelle. Au départ discipline purement empirique, cette approche, en empruntant à la pragmatique et à l’énonciation une partie de leurs outils, s’est structurée en une linguistique interactive, qui s’intéresse aujourd’hui à de nombreuses situations de communication (interview, débat politique télévisé, etc.).

Ces nouvelles sciences du langage ne font pas que s’ajouter à la linguistique du système de la langue. Elles remettent en cause les représentations formalistes, voire rationalistes, du langage.

 

LA COMMUNICATION

1)  LA COMMUNICATION EST COMPLEXE

Qu’et ce que communiquer ?

La réponse à cette question semble, pour la plupart d’entre nous, évidente. Communiquer serait l’acte le plus simple et le plus banal qui soit selon un modèle institutionnalisé, la communication est la transmission d’une information d’un émetteur A à un récepteur B par le biais d’un canal C. Cela s’applique à des contextes très divers : raconter, lire les informations, téléphoner, débattre, regarder la télévision, etc.

A partir du moment où le message est clair, le récepteur attentif, et qu’il n’y ait pas de perturbations dans le canal de transmission, le message devrait bien passer.

Or, cinquante ans de recherches sur la communication nous ont appris tout le contraire :

a)   Les messages que nous envoyons sont rarement clairs et précis mais comportent toujours une pluralité de significations ;

b)  Le récepteur est rarement un sujet passif qui se contente d’enregistrer les données transmises : il les filtre, les sélectionne, les transforme. Le canal et le contexte de la communication interviennent à leur tour sur le contenu du message ;

c)   On découvre que communiquer n’est pas seulement informer, c’est aussi chercher à influencer autrui, à se mettre en scène, à séduire ou à se défendre. Bref, la communication est rarement  transparente... C’est un acte complexe, élaboré et fragile dont il importe de dévoiler la face cachée si l’on veut mieux en comprendre et en maîtriser les processus ou le fonctionnement

2) LE MESSAGE EST EQUIVOQUE

Pour plusieurs théoriciens, il s’est agi, durant de nombreuses années, de proposer de formaliser le processus de transmission des messages, la communication. Des tentatives ont été souvent faites pour construire un modèle mathématique de la communication humaine.

Cette approche a vite connu ses propres limites à partir du moment où on comprit qu’un message contient plusieurs niveaux de signification.

Toute communication comporte toujours une « métacommunication » ; exprimée par le  bon employé, (ex : « Mais c’est fini de crier dans cette maison ») les expressions et les attitudes qui viennent se greffer sur le contenu premier du message. La forme prise par le message constitue en elle-même un message (« le chevalet »...).

La pluralité des significations d’un message peut provenir aussi de la polysémie des signes utilisés. Chaque mot, chaque phrase, chaque image renvoie, par un jeu de résonances, à des signification multiples et souvent cachées.

La communication publicitaire use abondamment de ces significations multiples pour associer à une marque une « image » particulière, faite de multiples références implicites.

L’ambiguïté des significations émises dans un message a été également mise en évidence par l’analyse de conversation.

Le canal de transmission possède aussi sa propre logique et contribue à donner au message une force ou une coloration particulière. Marshall Mac luhan (1911 - 1980), auteur de « la Galaxie Gutemberg » a eu, à ce propos, une formule célèbre : « le médium est le message » voulant montrer combien le support du message - parole, écrits, images - pourrait agir directement sur le message lui-même. Il existerait, selon MAC LUHAN, des médias « chauds » et « froids ». Les vus, comme la presse, la radio, sont peu interactifs et délivrent un message achevé et complet laissant peu de place à l’interaction ; les autres (la parole, le téléphone) livrent des messages diffus, incomplets, mais qui laissent place à l’interaction.

Il y ’a une très forte tradition de recherches sur cette question de l’impact relatif des différents types de médias. Ainsi, dès les années 40, des chercheurs américains, dont le psychosociologue KURT LEWIN, avaient montré au cours d’une expérimentation que le fait de participer à des groupes de discussion autour d’un thème (en l’occurrence des conseils sur l’alimentation délivrés à des mères de famille) avait beaucoup plus d’impact sur les participants que le fait d’assister à des conférences sur le même sujet.

Les liens de proximité et la participation active de personnes avaient donc plus de force pour faire passer un message qu’une communication institutionnelle et médiatique.

3) LE RECEPTEUR N’EST JAMAIS PASSIF :  

Du côté du récepteur - qu’il soit auditeur, lecteur ou spectateur -,  il existe aussi plusieurs facteurs de « brouillage » (parasite) de la communication. Celui qui reçoit une information n’est pas un réceptacle passif qui se contenterait d’enregistrer et de digérer les informations reçues. Le destinataire est toujours un sujet qui analyse, filtre, décode, interprète.

 

Dans le domaine de la communication, de nombreux « filtres » interviennent dans la sélection d’un message. Les informations transmises seront d’autant mieux reçues, écoutées, comprises, mémorisées, qu’elles touchent un centre d’intérêt de l’auditeur et qu’elles ne sont pas trop éloignées de sa culture et de ses références courantes.

 

Les autres filtres de l’information sont les suivants :

n La « surcharge cognitive » : nous ne somme capables de retenir qu’une somme d’informations limitée à la fois ; (la concentration pendant un cours).

n Le « knowledge gap » ou la distance entre le récepteur, son niveau de culture, et le niveau requis pour recevoir l’information.

n La « Dissonance cognitive »  est cette attitude courante qui consiste à éliminer ou à minimiser les informations qui contredisent trop fortement nos systèmes de croyances habituels.

Le processus de filtrage de l’information a permis de révéler, contre toute attente, que les grands médias sont loin d’avoir l’impact qu’on leur attribue souvent.

Le modèle « hypodermique » de l’impact des médias (l’image d’un auditeur passif à qui on inculque un message comme on injecte un produit avec une seringue ) s’est révélé inopérant (échec de campagnes électorales et publicitaires...) et il va être remplacé par le « two steps model » proposé par Katz et Lazarzfeld, selon lequel le récepteur filtre les informations en fonction de ses opinions préalables, elles-mêmes structurées par son milieu d’appartenance.

 

LES ENJEUX IMPLICITES DE LA COMMUNICATION :

Un autre facteur constitue à rendre encore plus complexe le processus de communication : la multiplicité des enjeux implicites. Communiquer, ce n’est pas simplement transmettre de l’information. Le psychosociologue ALEX MUCHIELLI(« Psychologie de la communication », PUF, 1995) a, par exemple, repéré cinq « enjeux de la communications » : l’enjeu informatif ; l’enjeu de positionnement consistant à définir son identité par rapport à autrui ; l’enjeu de mobilisation visant à influencer autrui ; l’enjeu relationnel ; l’enjeu normatif centré sur la régulation des relations elles-mêmes.    

 

B.  L’IMAGE

 

 

Introduction

 

Que notre époque soit marquée par l’invasion de l’image, c’est une opinion largement partagée parmi nos contemporains.

Suite à cette constatation, nous sommes amènes-nous, les consommateurs d’images - à nous interroger sur le poids et la menace qu’elles représentent pour notre destinée, notre quotidien et notre avenir.

Comprendre donc la manière dont l’image communique et transmet des messages serait un réflexe légitime, une attitude intellectuelle d’autant plus nécessaires que la virtualité des images nous cache, donc manipule, de plus en plus notre réalité.

En fait, notre situation présente est paradoxale : d’un côté, nous recevons les  images d’une manière qui nous semble tout à fait « naturelle », « normale », qui ne demande apparemment aucun apprentissage et, d’autre part, il nous semble que nous subissions le savoir-faire de quelques experts qui peuvent nous manipuler en nous submergeant d’images codées se jouant de notre naïveté.

L’un et l’autre de ces sentiments se justifient, puisque l’analyse de l’image nous permet d’apercevoir que tout lecture « naturelle » de l’image se fait à partir d’un code culturel et social intériorisé que nous avons en commun avec le message visuel que nous recevons. Message  et image n’excluent pas un travail de montage, une fabrication du « sens » à communiquer, donc une manipulation de signes.

 

USAGES ET SIGNIFICATIONS DE L’IMAGE

Le terme image possède aujourd’hui une telle diversité d’emplois, qu’il est presque impossible de trouver une définition qui les recouvre tous. On peut construire une définition qui ressemble à un puzzle au sein de laquelle vont s’additionner les usages et les significations dont l’image est l’objet.

On va commencer par reprendre ce que le « sens commun » entend par image pour dire que ce terme englobe toutes les représentations qui offrent un rapport d’analogie, avec les modèles du monde visible. Et à propos de cette idée de Représentation, Platon précise : « j’appelle images d’abord les ombres ensuite les reflets qu’on voit dans les eaux, ou à la surface des corps opaques, polis et brillants et toutes les représentations de ce genre »            . On remarque donc que l’image serait un objet second par rapport à un autre qu’elle représenterait selon certaines lois particulières.

Le sens connu, toujours, emploie le terme image dans des expressions comme « Dieu créa l’homme à son image ». Ce terme d’image, fondateur ici, n’évoque pas une représentation visuelle (comme dans les cas de la Télévision ou de la photo) mais une ressemblance. L’homme image d’une perfection absolue.

Dans notre enfance, ou nous a aussi appris qu’il faut être « sage comme une image ». L ‘image, alors, c’est précisément ce qui ne bouge pas, ce qui reste en place, qui ne parle pas.

On remarque donc que nous avons appris à associer au terme « image » des notions complexes et contradictoires (images fixes #  images animées) qui sont le reflet, et le résultat aussi, de toute notre histoire.

Des temps les plus anciens du paléolithique à l’époque moderne les images ont véhiculé, les messages d’hommes contraints de communiquer. Ces dernières imitent, en les schématisant visuellement, les personnes et les objets du monde réel. On pense que ces premières images pourraient avoir aussi des relations avec la magie et la religion.

Les représentations religieuses sont massivement présentes dans toute l’histoire de l’art occidental. En outre, la notion d’image, ainsi que son statut, représentent un problème clé de la question religieuse. Une religion monothéiste se devait, comme l’islam, de combattre les images, c’est à dire les autres dieux.

Dans le domaine de l’art, la notion d’image se rattache essentiellement à la représentation visuelle : fresques, peintures, enluminures, illustrations décoratives, dessin, gravure, films, vidéo, photographie...

On emploie encore le terme d’image pour parler de certaines activités psychiques telles que les représentations mentales, la rêve, le langage par image. Lorsqu’on parle d’ « image de soi » ou d’ « image de marque », on fait encore allusion à des opérations mentales, individuelles ou collectives qui insistent plus sur l’aspect identitaire de la représentation que sur son aspect visuel ou ressemblant.

Outil de communication, divinité, œuvre d’art, image mentale, l’image ressemble ou se confond avec ce qu’elle représente. Elle véhicule avec elle un fonds historique et culturel qui nous invite à l’approcher d’une manière approfondie.

Les différents utilisations du mot « image » nous renseigne sur les différentes formes et les sens multiples qu’on lui connaît. Il semble d’ailleurs que l’image puise être tout et son contraire : visuelle et immatérielle, fabriquée et naturelle, réelle et virtuelle, mobile et immobile, sacrée et profane, antique et contemporaine...

Pour mieux comprendre les images, leur spécificité ainsi que les messages qu’elles véhiculent, l’effort d’analyse s’impose.

La théorie sémiotique tente justement d’aborder l’image sous l’angle de la signification et non pas sous celui de l’émotion ou du plaisir esthétique, par exemple. Elle essaie de voir de quelle nature est le signe image  et de mettre à jour ses lois propres d’organisation et ses processus de significations.

 

            LA SEMIOTIQUE VISUELLE

Le travail de Charles Sanders Peirce (« Ecrits sur le signe » Seuil 1978) est à cet égard précieux, car il a essayé de penser dès le départ une théorie générale des signes et une typologie qui comprend la langue, bien entendu, mais insérée et relativisée dans une perspective plus large.

Sous l’impulsion de cette ouverture de la sémiotique à d’autres champs d’application, une pluralité de spécialités définies par leur objet et par leurs méthodes ont vu le jour, à partir des années soixante.

·      La sémiotique des médias : Elle s’intéresse aux messages visuels, écrits ou sonores. La publicité, l’affiche politique, les jeux télévisés, les reportages, constituent ses entres d’intérêt, (Jean-Marie Floch, « Sémiotique, marketing et communication » ; les travaux de R. Barthes).

·      La sémiotique des spectacles (cinéma, théâtre, opéra, stambelli...) c’est un domaine à part entière, fondé sur l’analyse de messages « plurivoques » : image, mouvement, parole, musique. (Christian Metz, « Langage et cinéma », 1992).

·      La sémiotique du geste traite de tous les codes corporels, qu’ils soient naturels, expressions, postures ; ou artificiels : langage des sourds-muets (Edward T. Hall «  la dimension cachée », 1971).

·      Enfin la sémiotique visuelle : elle s’applique à l’image en général. Les études sur la peinture s’intéressent particulièrement au signe plastique. L’analyse du dessin, de la bande dessinée, de la photographie, plus souvent au signe iconique.

Erwin Panofsky (1892-1968) historien et philosophe de l’art a développé une « iconologie » rigoureuse, fondée sur l’analyse des images peintes en motifs, thèmes et contenus de signification. Sans s’inscrire directement dans le courant de la sémiotique, il a instauré l’analyse de l’image comme discipline (E. Panofsky, « L’oeuvre d’art et ses significations », 1955)

 

Le PASSAGE DE LA PERCEPTION AU SENS DU MESSAGE VISUEL

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                                                                                                          Schéma

 

 

                                                                                               

LES DIFFERENTS TYPES DE SIGNES :

Rappelons d’abord que la linguistique considère comme arbitraires les signes dont la forme prise par le stimulus est indépendante de celle du référent.

En revanche, on appelle « motivés » tous les signes dont la forme entretient un rapport un tant soit peu nécessaire avec le référent. Ainsi les images qui sont fondés sur un rapport de ressemblance entre l’expression et le contenu sont considérés comme motivés. La combinaison de ces deux critères permet de répertorier quatre grandes familles de signes qui couvrent l’ensemble des objets de la sémiotique :

·      Les indices : sont des signes causalement motivés (trace d’une main sur la joue, rond humide du verre sur la table, le symptôme d’une maladie...)

·      Les icônes sont des signes motivés par ressemblance : l’image renvoyée par le miroir, la carte géographique, la maquette d’avion, l’imitation d’un cri d’animal... Comme le montre le dernier exemple, les icônes ne sont pas nécessairement des images, contrairement à ce que le mot suggère.

·      Les symboles sont des signes associant arbitrairement un signifiant et une abstraction. Ex : le vert pour « protection de l’environnement », la balance pour la « justice ».

·      Les signes au sens strict sont ceux qui composent les codes les plus sophistiqués. Ce sont les  signes linguistiques, les  numéros de téléphone, les symboles chimiques etc.

Les icônes et les signes obéissent à un découpage non correspondant, c’est à dire qu’on peut les décomposer en unités non signifiantes et les réutiliser pour la production d’autres signes. Ex : On peut prendre une couleur dans une carte géographique (icône) et la réutiliser pour en faire une autre image.

Par contre les symboles sont indécomposables, en ce sens que leurs éléments ne sont pas systématiquement réutilisable, à moins d’être eux-mêmes des symboles.

 

 

 

 

 

Motivé

 

Arbitraire

Découpage correspondant

Indices

Symboles

Découpage non correspondant

Icônes

Signes au sens strict

 

 

Notre liste serait incomplète si on n’évoquait pas quelques genres supplémentaires de signes, qui sont en fait des espèces particulières se rattachant à ces quatre familles. Par exemple, on parle souvent, depuis Peirce, des « index » : ce sont des signes qui ont pour fonction d’attirer l’attention sur un objet déterminé. Ex : le doit pointé vers un objet, les titres des livres et des tableaux, les inscriptions sur les magasins, les étiquettes sur les produits. Ce sont, on le voit, des signes arbitraires dont l’usager doit avoir appris les règles de lecture.

Il y a aussi les signes dits « ostensifs » qui ont également pour fonction de montrer, mais d’une autre manière. Ce sont, classiquement, les échantillons : morceaux de papiers peints, brins de laines, objets placés à l’étalage d’un magasin. Ces signes ostensifs sont motivés par la ressemblance, et sont donc des sortes d’icônes.

 

L’IMAGE ET SES SIGNES

L’ambition de la sémiotique visuelle est d’apporter à la lecture des images la même rigueur que celle que la sémiotique textuelle a pu développer à propos du discours littéraire, politique ou autre. Mais il faut reconnaître que l’image, lorsqu’elle n’est pas accompagnée de mots, ne se it pas comme un texte. Ce que nous reconnaissons en elle n’appartient pas, à priori, à un code appris. Nous pouvons donc nous poser la question suivante : Comment sommes-nous parvenus à reconnaître qu’il y avait quelque chose dans une image sans nous tromper trop souvent ?

Les signes qui spécifiquement servent à produire des images sont deux sortes : les signes plastiques et les signes iconiques.

·      Les signes plastiques sont ceux que l’on peut reconnaître lorsque l’on s’intéresse à la couleur, à la texture et à la forme d’une image. Ce ne sont des signes que dans la mesure  où ils renvoient à un signifié. A cet égard, on peut les rapprocher de deux familles de signes déjà citées : le symbole et l’indice. Une couleur peut renvoyer à un concept ou à une émotion, un graphique peut traduire le geste particulier du peintre. La sémantique plastique étant particulièrement plurivoque, et les signifiés peu définis, la lecture de ces signes relève d’une interprétation très ouverte.

·      Les signes iconiques sont fondés, comme on le sait, sur une relation de ressemblance entre le signifiant et le signifié. Ils sont plus contraignants : ce que nous reconnaissons dans un dessin, par exemple, semble aller de soi. Si c’est un chat, ce n’est pas un chien. La figure « ressemble » à l’objet (chat et non chien). Pourtant l’objet du dessin (chat) n’est pas du tout identique à l’objet (l’animal). Cette relation est mystérieuse elle semble naturelle, mais elle ne l’est pas tant que cela. Les rapports qui président au signe iconique posent des problèmes particuliers.

La structure du signe iconique comporte, comme celle de tous signe, quatre éléments : stimulus, signifiant, type, référent. La  raison de substituer le « type » au « signifié »  habituel vient, pour une part, de ce que le signifié d’un icône ne fait pas appel au mêmes savoirs que celui du signe linguistique.

L’identification d’une image fait en premier lieu appel aux données encyclopédiques : on conçoit le chat au fait qu’il a des oreilles pointues, une queue, des moustaches... Le « type » a une fonction particulière, que l’on comprendra si l’on considère la structure du signe iconique.

Le stimulus, c’est à dire le support matériel du signe (taches, traits, courbes...) entretient avec le réfèrent (la classe des animaux qu’on appelle les chats) une relation de transformation : le chat dessiné n’est pas du tout identique à l’animal chat. Mais je reconnais un chat parce que le stimulus est conforme à un type ( un ensemble d’attributs visuels : queue, moustaches, corps souple, oreilles pointus...) qui lui-même est conforme à ce que je sais de l’animal chat (le référent).

On peut donc dire que  pour un signe iconique, le processus de signification est essentiellement assuré par le fait que le stimulus (le dessin) et le référent (la chose représentée) entretiennent des rapports de conformité avec un même « type », qui rend compter des transformations qui sont intervenus entre le stimulus et le référent.

Un des problèmes du signe iconique est en effet qu’il procède par transformation du réel visuel : Quelles sont les règles de transformation ?, où les transformations doivent-elles s’arrêter pour être conformes à un signifié ? A quel moment passe-t-on d’un référent à un autre ?

Le premier principe à retenir quand on parle d’image est son hétérogénéité. C’est à dire qu’une image rassemble, au sein d’une même limite ( un cadre), différentes catégories de signes : iconiques, plastiques et linguistiques. C’est la relation entre ces derniers qui produit du sens.

En second lieu, il faut noter que toutes significations du mot « image » signalées précédemment, corroborent le fait que l’image c’est d’abord quelque chose qui ressemble à quelque chose d’autre.

La première conséquence de cette observation est de constater que ce dénominateur commun de la ressemblance, pose d’emblée l’image dans la catégorie des représentations. Si elle ressemble, c’est qu’elle n’est pas la chose même.

L’image a donc un statut de signe analogique qui se déplace sur un axe aux extrémités duquel on trouve, d’un côté, la confusion entre image et représenté (degré maximum de ressemblance) et, de l’autre côté, l’illisibilité (une ressemblance infime).

 

LES CODES DE RESSEMBLANCE

·      Les degrés de ressemblance

La technique la représentation analogique évoque les objets du monde visible par similitude apparente : de structure, de couleur, d’échelle, de texture... Nous pouvons constater une plus ou moins grande ressemblance avec le réel en passant de la photo, à la peinture, au dessin caricatural, et au schéma.

Toutes les images sont des signes visuels iconique mais leur degré d’icônicité se fonde sur un rapport différent avec la réalité.

·      a) La ligne, la forme : L’exemple du poisson :

Comment reconnaissons-nous dans ce dessin   un poisson ?

Il reproduit une forme commune à tous les poissons, mais il n’en conserve que les traits minimuns de reconnaissance. Les éléments du dessin sont des signes graphiques, composé du point, unité minimale d’expression, et de la ligne, ensemble de points, qui constituent cette forme motivée (motif) spécifique au type poisson.

Cette forme peut renvoyer dans un référent ou un répertoire à plusieurs poissons :  requins, daurades... dont  les détails caractéristiques ne sont pas indiqués dans le dessin. Nous sommes donc à un degré extrême de schématisation qui autorise cependant la reconnaissance.

La ligne - contour, qui cerne la silhouette du poisson, délimite une frontière noire dans l’espace indifférencié du fond, le support blanc. La ligne - contour est un cas particulier de forme parmi ce que le champ de la perception offre d’unités visuelles se combinant et s’articulant entre elles, prenant leur valeur les unes par rapport aux autre et par rapport au fond.

·      Le schéma :

 

 

 

 

 

 

 

                                                                     ²           &dessiner la fig.

 

 

Comment se fait le passage de la silhouette au symbole ?

n La technique du silhouettage : la ligne décalque  le contour suivant les règles du fond et de la forme.

n La schématisation réduit le modèle à sa structure en le stylisant. La figure ne représente plus que les parties caractéristiques du motif humain : tête, tronc, membres, ramenés à des formes géométriques simples telles que cercle et segments de droite, en imitant leurs rapports spatial et fonctionnel : axe vertical (tronc), angles d’articulation (bras/tronc), proportions relatives des éléments entre eux (longueur bras/jambes/tronc).

La schématisation ramène les objets et les corps à des formes géométriques élémentaires et permet de représenter la structure et les rapports logiques.

 

·      Fonction indicative de la ligne

Le signe iconique dans les exemples précédents prend en charge des aspects variables accessibles à la perception : position, mouvement, action, sentiments...

A l’expressivité proprement graphique s’associent des significations codées par la culture, d’ordre moral, philosophique, esthétique... constituées en de véritables modèles symboliques. Ainsi, la verticalité suggère l’élévation, la force, la spiritualité, la droiture morale, l’autorité . L’horizontalité suggère la matière, la pesanteur, la finitude terrestre...

Exemples :

 

 

 

 

 

 

Les associations sont infinies et le sens s’organise en fonction des combinaisons et oppositions de l’expressivité graphique.

Le graphiste, qu’il soit dessinateur, graveur, calligraphe, invente pour la ligne son propre mode d’expression : le trait, élément fondamental, est à proprement parler le traitement singulier de la ligne : épaisseur, force, intensité, densité, et toutes ses combinaisons constituent un champ de création et d’expression qui appartient à l’art et à son histoire.

            b) La couleur :

L’analogie avec le réel passe aussi par la technique de la couleur qui tend à reproduire notre perception colorée du monde visible.

Notre rapport à la couleur est culturel et les couleurs ont une histoire (l’ocre et le noir charbon des peintures pariétales, le pourpre des Romains, le vert des musulmans...).

La couleur, au delà des jugements de valeur qu’elle suscite, fait partie intégrante du rapport que l’homme entretient avec le monde matériel et spirituel. Pour cette raison, elle a été l’objet d’analyse et de théories qui ont tenté d’attribuer une spécificité au phénomène et au sens des couleurs. 

·      Couleur et perception des couleurs

 

La couleur et la lumière sont indissociablement liées : chaque corps nous apparaît coloré parce qu’il absorbe toutes les couleurs de la lumière blanche et ne réfléchit que celle qui lui correspond. La lumière révèle donc les couleurs.

·      Spatialité :

Un autre des effets propres à la couleur est sa spatialisation. Sur un fond noir, le jaune semble venir en avant alors que le violet paraît y flotter. Sur un fond blanc, l’effet de profondeur des mêmes couleurs est inversé. Les qualités de clarté, obscurité, froideur, chaleur, et la quantité de couleurs produisent des effets de profondeur divers, ceci indépendamment des effets de perspective, illusionnistes dus à la construction dessinée d’une composition.

·      Valeur symbolique et expressive de la couleur :

Si, comme la ligne, la couleur prend sa signification par analogie : - Rouge = sang, feu, matière en fusion -, elle possède aussi une valeur expressive et une symbolique acquises tout au long de histoire, faites de choix esthétiques, politiques, économiques...

 

L’ANALYSE DE L’IMAGE :

Analyser l’image n’a pas été une attitude ou une posture intellectuelle facilement admise. Il y avait plusieurs réticences :

n L’idée que l’image est « naturellement » lisible ;

n La complexité et la richesse du message visuel qui rendraient vaines toute tentative de lecture « L’auteur a-t-il voulu dire cela » ?

n L’impossibilité de saisir le sens de l’image « artistique » parce qu’ellerelèverait de l’émotif, de l’affectif et non de l’intellect.

Une analyse pertinente se définit d’abord par ses objectifs. Définir l’objectif est en effet indispensable pour mettre en place les outils de l’analyse, tout en se rappelant qu’ils déterminent et l’objet de l’analyse et ses conclusions.

·      Ainsi, lorsque R. Barthes se fixe pour objectif de chercher si l’image contient des signes et quels sont-ils, il invente sa propre méthodologie. Elle consiste à postuler que ces signes à trouver ont la même structure que celle du signe linguistique : 5é/5a

C’est ainsi qu’il découvre que le concept d’italianité (signifié) de la publicité PANZANI est produit par différents types de signifiants : un signifiant linguistique (la sonorité italienne du nom des pâtes), un signifiant plastique (la couleur vert, blanc, rouge), et enfin des signifiants iconiques représentant des sujets socioculturellement déterminés : tomates, poivrons, oignons, boîte de sauce, fromage...

La méthode de Barthes mise en place ici - partir des signifiés pour trouver les signifiants, et donc les signes, qui composent l’image - s’est montrée intéressante et parfaitement opératoire.

·      Si la méthode est de découvrir plus précisément les messages implicites véhiculés par une publicité, ou n’importe quel autre message visuel, la méthode utilisée peut être absolument inverse. On peut recenser systématiquement les différents types de signifiants co-présents dans les message visuels concernés et leur faire correspondre les signifiés qu’ils appellent, par convention ou par usage. La formulation de la synthèse de ces différents signifiés pourra être alors considérée comme une version plausible du message implicite véhiculé par l’annonce.

[PERMUTATION, SEGMENTATON, OPPOSITION, Presence-Absence, voir page jointe]

 

 

I.3 : LOUIS HJEMSLEV (1899 - 1965)

        Continuateur de SAUSSURE

·      L’ouvrage que publia L.H. en 1943 « Prolégomènes à une théorie du langage » montre que le « Cercle linguistique de Copenhague » avait refait par lui-même une grande partie du chemin parcouru par SAUSSURE.

La préoccupation de L.H. est très proche de celle de F. de SAUSURE : « Au cours du XIXè siècle, la science du langage devait devenir la science de l’histoire des langues et ce n’est qu’à notre époque que la synthèse et la recherche de la systématisation reviennent au premier plan et, par là, le nom de la linguistique qui désigne la science linguistique non comme histoire de la langue, mais comme science systématique et universelle ... » in L.H., nouveaux essais, PUF, 1985.

·      Après avoir imposé dans la continuité de SAUSSURE, le primat du théorique, L.H. développe sa conception personnelle de la théorie de la fonction : ou dire qu’il y a une fonction sémiotique entre deux termes *** ces deux termes sont solidaires et ne peuvent pas être définis l’un sans l’autre. (influence du sens mathématique de fonction f(x,y)...).

Puis L.H. reprend le binôme pour les deux faces de la fonctions sémiotique majeure l’appellation : expression et contenu.

·      Une des intuitions fondamentales de L.H. est d’avoir accordé à la langue la propriété de pouvoir traduire toutes les autres langues et toutes les autres sémiotiques non verbales. Cette représentation de la langue comme « interprétant universel » sera longuement reprise par E. Benveniste (sémiologie de la langue).

·      Sémiologie et Sémiotique :

Nous saisissons ici, à son point d’origine, la bifurcation qui devait ouvrir un clivage dans le champ de la sémiotique européenne entre d’un côté LA SEMIOLOGIE qui, à la suite de Jakobson et de R. Barthes, adoptait cette interprétation « linguistique » du sémiotique, et de l’autre côté la SEMIOTIQUE, qui choisissait de considérer, une par une, les diverses sémiotiques non verbales sans prétendre les traiter métaphoriquement comme des sortes de linguistiques.

·      L.H. fonde le Cercle de Copenhague après avoir entendu les thèses de R. Jakobson au Ier congrès international de la linguistique de la Haye en 1928.

·      Par-delà tous les débats et polémiques qui ont accompagné l’histoire de la sémiotique, tous les chercheurs et théoriciens du domaine reconnaissent dans les concepts hjelmisléviens « la base épistémologique de la théorie sémiotique et plus généralement un modèle de référence pour  l’ensemble des sciences sociales ».

A.J. GREIMAS ET L’ECOLE DE PARIS (1917 ...)

·      A.J.G fut, dès le début des années soixante, le vrai continuateur de HJELMSLEV et SAUSSURE dans l’étude des significations.

·      Parcours particulier ...

·      En 1936, Jeune étudiant lituanien de seize ans qui connaissait l’allemand et lisait *** dans le texte, obtint une bourse pour venir apprendre le français à Grenoble.

·      En 1944, ses parents sont déportés par les soviétiques et il émigre vers Paris où il s’inscrit pour une thèse en lexicologie auprés de Ch. Bruneau sur « la mode en 1830. Essai de description du vocabulaire vestimentaire d’après les journaux de mode de l’époque » (1949).

·      Il part pour Alexandrie où on lui propose d’assurer un cours d’histoire de la langue française. Il y rencontre R. Barthes.

    Un petit groupe se forma et constitue l’ossature  d’un cercle de lectures et de débats sur

      l’épistémologie où on découvrait R. Jakobson, Hjemslev, Lévi-Strauss, Mauss, Lacan... 

·      Au début des années soixante, Greimas, décide de s’associer à d’autres chercheurs pour fonder «  la Société d’Etude de la Langue Française ».

En 1962, Greimas intègre officiellement l’université française en tant que professeur à 

l’université de Poitiers et donne un cours de sémantique structurale à l’institut R. Poincaré à

Paris.

·      Avec R. Barthes, il fonde la revue « Langages » qui va associer à la linguistique la préoccupation sémiotique

·      Grâce à L. Strauss, Greimas c’est nommé en 1965 Directeur des études à l’Ecole des Hautes Etudes. Poste de chercheur qui va lui permettre d’animer un séminaire sur la théorie de langage, et ceci jusqu'à sa mort.

ROLAND BARTHES (1915 - 1980)

·      R. Barthes fait une entrée fracassante dans le champ de la sémiotique et de la critique littéraire avec un livre publié en 1953 et intitulé « le degré zéro de l’écriture ». Il innove en situant l’engagement que représente l’écriture, non pas dans le contenu de l’écrit mais dans sa forme. Le langage passe du statut de moyen à celui de finalité.

·      De 1954 à 1956, Barthes envoie chaque mois un article à la revue « Les lettres nouvelles ». Il entreprend alors une œuvre systématique de démontage, de démystification, en montrant comment fonctionne un mythe dans la société contemporaine à partie de cas concrets de la vie quotidienne. Ces articles, au nombre de 54, ont été rassemblés dans son ouvrage « Mythologies » qui paraît au Seuil en 1957.

·      La partie théorique qui clôt l’ouvrage (Mythologies) se place sans la double filiation de Saussure dont il reprend les notions de signifiant /signifié, et de Hjelmslev, dont il emprunte les distinctions entre dénotation et connotation.

·      La revue « Communication » présente dans son n°4 de 1964 un article de Barthes : « Les éléments de sémiologie » qui va faire figure de manifeste pour une nouvelle science : la sémiologie.

    Il appliquera cette science nouvelle au domaine de la mode et publie en 1973 « Le système

    de la mode ».

LVADIMIR PROPP

·      V Propp. n’est pas considéré, à proprement parler, comme un sémioticien. Ce sont R. Barthes, C.L.Strauss et A.J. Greimas qui, par la lecture qu’ils ont faite de son œuvre, l’on adopté dans le cercle des fondateurs de la sémiotique. V.Propp n’eut, semblet-t-il, aucune part à la fondation du Cercle de Linguistique de Moscou en 1915 ni à celle de la Société d’Etudes du langage poétique de Petersbourg en 1916 qui furent deux centres  d’activités du formalisme russe.

[Les formalistes cherchent les procédés et les techniques de l’art verbal et avaient donc les préoccupations des précurseurs de la Sémiologie]

·      L’importance de la contribution de V. Propp à la sémiologie tient dans son ouvrage : « La morphologie du conte » qu’il publia en 1928 et qui lui valut une grande notoriété en Russie.

Dans une réponse aux critiques de L. Strauss parue  en 1960, V. Propp explique qu’il a cherché, dans son ouvrage, à observer en comparant une série de contes qui avaient comme sujet commun les persécutions d’une marâtre, ce qui demeurait identique d’un conte à l’autre malgré les changements de personnages et de circonstances : à sa grande  surprise, Propp avait découvert que malgré l’extrême diversité de l’ensemble des contes soumis à l’analyse, un certain nombre d’action figuraient dans tous les contes et, de plus, la succession de ces actions suivaient le même schéma, le même ordre ... n’a-t-on pas forcément affaire au même conte, même si les détails changent ?

·      La nouvelle méthode d’analyse allait donc se concentrer sur les actions dénommées « fonctions ». (Non pas « ce qui sert à » mais fonction = l’action d’un personnage, définie du point de vue de sa signification dans le déroulement de l’intrigue »). Exemple : le fait de recevoir de l’argent remplit des fonctions diverses : récompense ? acheter un cheval pour un exploit ?...

·      V.Propp a donc élaboré une idée sémiotique, mais il semble ne pas s’être bien rendu compte de tous les retentissements qu’aurait sa découverte concernant le caractère automatique des sphères d’action des principaux protagonistes du conte.

Il a su en fait objectiver la structure spécifique du conte merveilleux à partir de l’inventaire immuable de ses fonctions. La psychologie des personnages, leur rang dans la société ou tout autre détail physique étaient considérés comme un habillage (emballage) circonstanciel. Mais Propp ne semble pas avoir perçu la hardiesse et la pertinence de son analyse.

Après Propp, on ne dira plus : un méchant espionne et trompe,, et un bon qui va réparer les torts... Mais : dans tout conte, il y a toujours un méchant qui nuit et un bon qui s’oppose à lui... La conte n’est plus le domaine de la fantaisie absolue ; les acteurs ou protagonistes, définis par leurs fonctions constamment réitérées, apparaissent comme de véritables préposés à un faire programmé  de tout temps.

Propp comme Saussure, se désintéressait des procédés voulus pour se concentrer sur les lois qui échappaient à la conscience du sujet parlant.

I.    2.1 LA COUPURE SAUSSURIENNE

·      Un moment décisif dans l’histoire de la linguistique... Il a fallu attendre la publication du Cours de linguistique générale (CLG) pour voir naître la linguistique moderne.

·      F. de SAUSSURE publie en 1879 « Mémoire sur le système primitif des voyelles dans les langues européennes ». Les travaux de Saussure ont entraîné une transformation profonde dans la méthodologie des Sciences humaines.

Il y a une orientation nouvelle : Inscrire la linguistique parmi les Sciences dures. Proposer une théorisation rationnelle, une logique des phénomènes langagiers et mettre en place des lois linguistiques.

·      Un des soucis fondamentaux de Saussure est de situer la linguistique dans l’inventaire des services humaines... Il insiste sur l’importance d’une science très générale, qu’il appelle sémiologie, et dont l’objet serait les lois de la création et de la transformation des signes et de leur sens... Comme le plus important des système de signes, c’est le langage conventionnel des hommes, la science sémiologique la plus avancée, c’est la linguistique ou sciences des lois de la vie du langage »

 

·      « Mémoires... » soutenue en 1878 à Leipzig rencontre une vive opposition de la communauté scientifique. Déception de Saussure, repliement sur soi, son  œuvre est  restée longtemps méconnue.

En 1905 Saussure hérite de la Chaire de « linguistique générale et d’histoire comparée des langues européennes ». 26 ans après les « Mémoires », Saussure revient à sa première idée, combattu  à l’époque, de théorisation linguistique sous la forme  d’un « Cours de linguistique générale » (1906-1911), qui fut publié deux ans après sa mort, c’est à dire en 1915.

·      On ne note pas de grandes avancées dans la singularisation et l’institutionnalisation de la linguistique Saussurienne jusqu’en 1945-1949.

·      On continue à concevoir la linguistique comme une branche de la psychologie et de la philosophie.

·      A partir de 1941, la Société de  linguistique de Genève se lance dans la publication des « Cahiers Ferdinand de Saussure » qui vont polariser l’attention d’une grande partie des chercheurs et des recherches en linguistique à l’échelle européenne.

·      Les écrits de Saussure vont dans le même mouvement attirer l’attention des structuralistes et de l’anthropologie structurale, en particulier, pour la pertinence de la démarche théorique et la méthodologie.

A. Linguistique et sémiologie

« La langue est un système de signes exprimant des idées, et par là, comparable à l’écriture, à l’alphabet des sourds-muets, aux rites symboliques, aux formes de politesse, aux signaux militaires, etc., etc. Elle est seulement le plus important de ces systèmes.

On peut donc concevoir une science qui étude la vie des signes au sein de la  vie sociale ; elle formerait une partie de la psychologie sociale, et par conséquent de la psychologie générale ; nous la nommerons sémiologie (du grec semeion, « signe »). Elle nous apprendrait en quoi consistent les signes, quelles lois les régissent. Puisqu’elle n’existe pas encore, on ne peut dire ce qu’elle sera ; mais elle a droit à l’existence, sa palace est déterminée d’avance. La linguistique n’est qu’une partie de cette science générale, les lois que découvrira la sémiologie seront applicables à la linguistique, et celle-ci se trouvera ainsi rattachée à un domaine bien défini dans l’ensemble des faits humains.

C’est au psychologue à déterminer la place exacte de la sémiologie ; la tâche du linguiste est de définir ce qui fait de la langue un système spécial dans l’ensemble des faits sémiologiques. » (F. de Saussure, Cours de linguistique générale, Payot, p. 33)

·      C.L. Strauss publie en 1945 « L’analyse structurale en linguistique » on commence alors à lire et à relire Saussure. Cet intérêt pour la pensée saussurienne, nouvelle théorie pilote de toutes les sciences  sociales, atteint son point culminant en 1970.

·      Tout en étant conscient de cette nécessité de fonder une théorie linguistique indépendante, Saussure continuait à considérer le phénomène linguistique comme une branche de la psychologie Comment est donc apparue le terme de sémiologie ? Avec quel contenu ?

C’est dans le CLG que nous rencontrons pour la première fois le vocable sémiologie pour désigner « une science qui étudie la vie des SIGNES au sein de la vie sociale ; elle formerait une partie de la théorie sociale »

Cette apparition du terme sémiologie reste aussi bizarre que son intégration dans le domaine de la théorie de Saussure qui présente la sémiologie comme un lien entre psychologie et linguistique, comme un domaine indépendant de la psychologie.

COURS DE LA SEMIOLOGIE

I  La petite histoire histoire de la linguistique

    et des fondateurs de la sémiologie :

I.1 Les origines de la réflexion sur le langage :

·      Le nom de la linguistique : né en allemand en 1777, adapté en français en 1812.

« employer un mot pour désigner l’acte de parler, c’est déjà distinguer comme spécifique une activité humaine différente de toutes les autres, et la prendre comme objet de son discours : c’est en somme PARLER sur le PARLER. (le métalangage).

·      l’invention de l’écriture est la première réflexion linguistique car elle suppose nécessairement une analyse de la langue. Donc  un découpage et une identification des unités constitutives du discours. Ces unités qui donnent lieu aux signes de l’écriture. Quand ce sont des mots (unités chargés de sens) on a des écritures idéographiques (le chinois), les Egyptiens,

** ce sont des sons, ce sont des écritures phonographiques.

 les langues ne sont pas homogènes, mélange idéo et phono (a, b, c et 1, 2, 3).

I.2 La constitution d’un champ autonome de réflexion sur la langue (le XIXè siècle ) 

Le XIXè siècle fait apparaître la linguistique comme science autonome de la philosophie... elle prend une forme à la fois historique et comparative : ... rechercher la « généalogie des langues »... et identifier les relations entre les  différentes langues.

La fin du XIXè siècle consacre en Allemagne les « grammairiens ».

En France -où la grammaire comparée marque le pas- Michel Bréal (1832-1915) fonde LA SEMANTIQUE, « science des significations ».

Aux Etats-Unis, Whitney (1827-1894) met en place une réflexion qui, notamment par la formulation de l’arbitraire du signe, annonce celle de Saussure.

Toujours aux Etats-Unis, Charles Sanders Peirce (1839-1914) pose, dans le cadre d’une réflexion philosophique extrêmement générale, les fondements  de la SEMIOTIQUE, science qui prend pour objet l’ensemble des phénomènes de signification, linguistiques et non linguistiques. A cet effet, il procède notamment à une typologie des signes.

Est-ce sous l’influence des idées de Durkheim qui considéraient que la vie sociale détermine dans une grande partie comportements collectifs et consciences individuelles, et que donc toute science de la « représentation » de l’ « expression » de la vie sociale (comme la langue) ne peut - être qu’une psychologie sociale. Est-ce sous cette influence que Saussure fortement conscient de la dimension sociale de la langue, va proposer qu’on considère la sémiologie comme une partie de la psychologie sociale ?. Saussure représente le social comme une pesanteur, active par sa seule masse et soumise à une autre pesanteur, le facteur temps.

« Trésor », « cristallisation sociale », « sédimentations » (couches géologiques), « forces qui sont en jeu d’une manière permanente et universelle dans toutes les langues »... ce sont toutes des expressions utilisées par Saussure pour parler de la sémiologie.

·      Saussure est-il parvenu à fonder une scientificité nouvelle, en prenant pour objet « la langue », telle qu’il la définit comme cet « ordre intérieur du langage »... Saussure aura-t-il été l’Ampère, le Newton ou l’Einstein des sciences du langage ? Oui, la preuve : il eu des adeptes et des continuateurs...

I PETITE HISTOIRE DE LA LINGUISTIQUE

  ET DES FONDATEURS DE LA SEMIOLOGIE

I.1 Les origines de la réflexion sur le langage

La nature comme langage du divin :

Et si le monde était le produit d’un dessin divin, qui aurait organisé les objets de la nature pour en faire les instruments d’une communication avec l’homme ?

C’est l’hypothèse néoplatonicienne qui sous-tend les premières métaphysiques médiévales. Dieu se montre à travers les signes que sont les choses, et, à travers ceux-ci, opère le salut de l’homme. Tout le symbolisme médiéval découle de cette hypothèse.

Le langage allégorique à décoder, les signes véritables par rapport à quoi l’Ecriture constitue une sémie substitutive, sont les événements de l’Histoire Sacrée, mots d’un langage cosmique que Dieu a organisé afin que nous puissions y lire notre devoir et notre destin.

Mais, pour établir une métaphysique pan-sémiotique, point n’est nécessairement besoin d’un protagoniste divin. Il suffit que domine un sens de l’unité du Tout, de l’univers conçu comme Corps se signifiant à lui-même.

Ne pourrait-on pas, dès lors, relire l’immense parabole de l’idéalisme moderne comme une théorie de la productivité sémiotique de l’esprit ?

Ce n’est plus Dieu qui parle à l’homme à travers des signes, mais Dieu qui se construit dans l’histoire, comme Esprit soufflant sur une grande scénographie symbolico-culturelle.

Cette philosophie voit dans le langage une grande métaphore inconsciente, étroitement lié qu’il est à l’essence intime des choses.

Ce n’est pas l’homme qui façonne le langage pour dominer les choses, mais les choses (ou la Nature, ou l’Etre) qui se manifestent à travers la langage : le langage est la voix de l’Etre, et la Vérité n’est rien d’autre que le dévoilement de l’Etre à travers le langage. Si ce point de vue prévaut, alors, il n’y a plus de place pour une sémiotique, ou une théorie des signes. Il ne subsiste plus qu’une pratique continuelle et passionnée d’interrogation des signes : l’herméneutique. En herméneutique, on ne construit point de théorie des conventions sémiotiques : on reçoit, humblement et fidèlement, la voix qui parle d’un lieu où il n’est aucune place pour la convention, car elle précède l’homme lui-même.

La grammatologie, ou science de l’écriture, se demande aujourd’hui si les tourments métaphysiques qui ont longuement assailli l’homme occidental ne sont pas eux-mêmes structurés sur le modèle des grammata (Derrida, 1967).

 

 

 

 

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